L’écriture est un acte complet qu’il faut analyser. Une partie vient du mécanisme moteur, une autre du travail de l’intelligence.
Dans le mécanisme moteur, faut-il encore distinguer deux groupes : l’un destiné à manier l’instrument d’écriture, l’autre à dessiner la forme des lettres.
[…] Étudions les deux groupes de mouvements dont nous venons de parler.
1° D’abord, celui dont dépend le maniement de l’instrument : il s’agit de la tenue de la plume ou du crayon qui doit se serrer avec trois doigts de la main et se mouvoir de haut en bas, avec cette sûreté que nous appelons « l’élan » de l’écriture ; c’est un mouvement si personnel que chacun de nous, bien que pratiquant le même alphabet, écrit selon son propre caractère, et qu’il y a autant d’écritures que d’individus.
[…] La main de l’enfant de six ou sept ans a perdu sa période précieuse de sensibilité motrice. Cette petite main délicate a dépassé le temps où elle faisait ses délices de coordonner ses mouvements : cette période en laquelle se « créait » la main « fonctionnelle » ; et la voilà « condamnée » à un effort douloureux et contre-nature !
Il faut retrouver une main enfantine qui ne soit pas encore coordonnée : la main fouineuse du tout petit enfant de quatre ans qui « touche à tout », à la recherche irrésistible et inconsciente de ses coordinations définitives.
Pour aider à l’établissement de l’écriture, il faut, après avoir analysé les mouvements variés qui y concourent, chercher à les développer séparément, indépendamment de l’écriture véritable. C’est ainsi que nous pouvons faire collaborer chaque âge, avec ses propres possibilités, à la construction de ce mécanisme si compliqué.
2° Voyons maintenant le groupe des mécanismes qui permettra de dessiner les formes de l’alphabet. Dans les exercices sensoriels, qui s’accompagnent de fins « mouvements de la main », et qui intéressent l’enfant au point de lui faire répéter indéfiniment les mêmes gestes, nous trouverons le temps psychologique et les moyens extérieurs adaptés pour la préparation des mécanismes de l’écriture.(Maria Montessori, Pédagogie scientifique I)
La réflexion de Maria Montessori sur l’apprentissage de l’écriture aboutit à cette ligne directrice de sa psycho-pédagogie : l’action indirecte. C’est en préparant les capacités motrices et les capacités d’analyse que l’apprentissage de l’écriture se fera naturellement. Le matériel de vie pratique tout comme le matériel sensoriel, qui sont présentés aux enfants dès 3 ans, deviennent alors indispensables à cet apprentissage, tout autant que les lettres rugueuses et l’alphabet mobile.