Isolement d’une qualité unique dans le matériel sensoriel

Comment devrons-nous procéder pour que la série d’objets mette en évidence une seule qualité ? Il faut en isoler une seule. La difficulté grandit avec les séries et les gradations : il faut donc préparer des objets identiques en tout, sauf pour une qualité qui varie.

Si nous voulons préparer des objets qui servent à faire distinguer, par exemple, les couleurs, il faut les construire de la même substance – formes et dimensions – et ne les faire différer que par la couleur. Si nous voulons préparer des objets dont le but est de faire observer les tons de la gamme musicale, il faut que ces objets soient parfaitement semblables en apparence comme, par exemple, les clochettes dont nous nous servons dans notre système : elles ont même forme et même dimension, et s’appuient toutes sur un socle identique, mais, en les frappant d’un petit marteau, elles donnent des sons différents ; c’est l’unique différence perceptible aux sens.

Les petits jouets musicaux, faits de tubes disposés en tuyaux d’orgues, ne se prêtent pas à un véritable exercice du sens musical destiné à différencier « les sons », car l’œil peut aider à les distinguer, guidé par les dimensions différentes, alors que l’oreille doit être seul récepteur et seul juge.

Du point de vue psychologique, on a remarqué que, pour mieux révéler la qualité particulière, il faut, autant que possible, isoler les sens : une impression tactile est plus claire s’il s’agit d’un objet qui n’est pas conducteur de la chaleur, c’est-à-dire qu’il n’apporte pas en même temps des impressions de température ; et l’impression sera d’autant plus perceptible si le sujet se trouve dans un endroit obscur et silencieux où il ne peut recevoir d’impressions visuelles ni auditives qui troublent ses impressions tactiles.

Le procédé d’isolement peut donc être double : isoler le sujet des autres impressions du milieu, et graduer le matériel selon une seule qualité.

Cette précision, qui est comme la limite de la perfection vers laquelle il faut tendre, rend possible un travail d’analyse intérieure et extérieure propre à ordonner l’esprit de l’enfant.

Le petit enfant qui, par sa nature, est un explorateur passionné du milieu, parce qu’il n’a encore eu ni le temps ni le moyen d’en faire une connaissance exacte, souvent, « ferme les yeux », ou se les bande pour se soustraire à la lumière quand il explore les formes avec les mains ; ou volontiers, il accepte l’obscurité pour arriver à percevoir les bruits les plus fins. (Maria Montessori, Pédagogie Scientifique, tome 1)

J’ajoute que pour les plus jeunes enfants, il est parfois difficile de se soustraire à la perception visuelle (fermer les yeux ou mettre un bandeau), ce qui n’est plus le cas avec le temps.

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